De Parakou à Grand Popo (Bénin)

Nous nous arrêtons deux jours dans la ville tranquille de Parakou. Ici tous les gens sont très accueillants. Au petit marché, l’ambiance est décontractée et pour une fois on est pas trop serré. On y trouve des petites échoppes avec de tout : fruits, légumes, produits ménagers, artisanats, fétichismes avec des coris, des animaux morts, des pattes de poule… Mélanie en profite pour se faire tresser.

Vendredi 7 avril, nous prenons la route inter-état qui relie le sud du Bénin au Niger. La circulation est beaucoup plus importante et les voitures roulent à une allure folle. On nous a parlé, avant notre départ des serpents, des scorpions, des bêtes sauvages, des maladies les plus horribles, mais nous nous rendons compte que le danger vient tout d abord des voitures. Un jour, alors que nous roulons tranquillement l’un derrière l’autre, un camion surgit en sens inverse sur notre voie et nous fonce droit dessus. Il nous indique de nous mettre sur la voie de gauche. Flo s’arrête sur le bas cote tandis que Mélanie suit les indications du routier. Mais le camion part aussi sur la gauche et fonce sur Mélanie. Tout ce passe très vite et heureusement il ne la touche pas mais on ne sait pas comment. Mélanie s’arrête toute tremblante sur le bord de la chaussée. Cette fois ci encore notre bonne étoile veillait sur nous.

Plus nous descendons vers le sud, plus le paysage est verdoyant. Par moment on se croirait presque en Normandie. Mais la végétation reste différente : manguier, « cajoutier », teck, palmier,…Le ciel, quand à lui, est souvent couvert de gros nuages gris qui nous font craindre la pluie. Néanmoins, à part quelques gouttes, nous nous en sortons bien même si l’atmosphère reste très humide et que nous sommes moites à peu près 24 h sur 24.

Depuis que nous avons rejoint la route inter-état, les « yovo cadeaux » reviennent en force. Au début, nous faisons abstraction mais plus les jours passent et plus ça devient pesant. Les enfants nous demandent (mais ça on excuse), les femmes, les hommes, les vieillards, les vendeurs…. enfin tout le monde. Même lorsque l’on dit « bonjour ça va » on nous répond « cadeaux ». Un jour, Flo s’amuse à les compter. En une matinée, il en dénombre 216. Ce n’est pas rien.

Au bout de 4 jours de route, nous traversons la petite ville de Save avec ses 6 collines de granit en forme de mamelons. C’est vraiment magnifique. Nous sentons que nous nous rapprochons de l’Équateur. Le lendemain, nous passons la bourgade de Dassa qui est aussi entourée de hautes collines rocheuses.

Depuis le Mali, nous trouvons de temps en temps des petits vendeurs d’essence. Ils ont des étales avec plein de bouteilles de pastis remplies de combustible. Mais le phénomène ici est vraiment amplifié. Dans les villages, on en croise tous les 10 mètres. C’est en fait de la contrebande d’essence venant du Nigeria. C’est tout a fait illégal, mais même les policiers viennent se servir (gratuitement) dans ces « stations services ».

A notre grand étonnement, nous rencontrons sur la route énormément d’églises évangéliques. Il y en a presque une dizaine par village : église du christianisme céleste, église évangélique de l’assemblée de dieu, église de pentecôte, église apostolique, les témoins de Jéhovah…

Jeudi 13 avril, nous atteignons la ville d’Abomey. C’est ici que résidaient les anciens rois du Dahomey. Nous nous installons dans une petite auberge qui ressemble à la caverne d’Ali Baba ou à un temple fétichiste. Nous en profitons pour interneter, goûter les plats béninois (pâte d’igname…) et Flo fait ressouder la béquille de son vélo qui s’est brisée la veille. C’est réparé « à l’arrache » mais ça tient. C’est l’essentiel. Nous découvrons aussi la présence importante du culte vaudou. Souvent en traversant les villages, nous apercevons les cérémonies pour différents fétiches. Il y a toujours de la musique et des danses. Le soir, alors que nous sortons en ville, nous croisons une cérémonie vaudou. Il y a en fait trois revenants avec de superbes costumes orange, bleu et noir et avec de grands masques. Ils essaient d’attraper les gens qui se trouvent autour et ces derniers se sauvent alors en courant. S’ils sont attrapés la malédiction tombent sur eux et ils meurent pour devenir revenant à leur tour. Ils nous disent que c’est pour faire peur aux enfants et que ça les amusent mais dès qu’un revenant s’approche d’eux, ce sont les premiers a courir.

Le lendemain, c’est vendredi saint. Nous croisons le chemin de croix avec un millier de personnes. Ils chantent, se prosternent…Malgré la pluie battante, ils s’agenouillent tous ensemble un quart d’heure pour prier. C’est vraiment très émouvant.

Ensuite, nous quittons la grande route inter-état pour nous diriger vers Grand Popo. D’un coup, les « yovo cadeaux » disparaissent et nous pouvons rouler sereinement. A midi, après cinquante cinq kilomètres, nous plantons la tente au bord d’un champ. L’après-midi, Désiré, un jeune garçon, vient nous voir. C’est en fait le champ de son village. Il est très sympa et nous montre comment poussent toutes les plantes de son jardin : le manioc, le mais, l’igname, l’ananas, le teck, le nime (contre le palu)…Le soir, il nous propose d’aller dormir dans son village. Nous acceptons volontiers, plions la tente et toutes nos affaires. Il nous amène devant la case du chef, nous sort deux chaises, puis nous laisse là. Tout le village est autour de nous et nous observe. Chacun reprend sa place hiérarchique et du coup Désiré ne peut pas rester avec nous. Au bout de deux heures d’attente, le chef arrive enfin. Il nous salue puis part vaquer à ses occupations. On nous sert alors à manger de la farine de manioc à mélanger avec de l’eau et des beignets d’arachide. Une fois le repas terminé, nous attendons de nouveau mais personne ne semble vouloir nous parler. Du coup, nous nous couchons sur nos nattes devant la case du chef. Nous avons du mal à trouver le sommeil entre les moustiques, les poules, les chèvres, le groupe électrogène et les gens qui nous observent.

A 6 heures du matin, les villageois sont de nouveau là à nous regarder. Une heure plus tard, après que le chef nous ait autorisé à partir, nous quittons le village encore plus fatigué et à jeune. Une très bonne expérience mais pas de tout repos. Nous ne le referons pas tous les jours. Deux jours plus tard après avoir traverse les marécages, les cocoteraies, et essuyé quelques pluies, nous arrivons à Grand Popo. Nous nous installons au camping dans un cadre paradisiaque. Plage, mer bleue azur, cocotiers, piscine,…enfin le rêve pour des cyclistes en quête de repos.